16 avril 2008

Featuring Animals

Rentrer dans l’univers de dAS MODEL est un voyage atypique, et la première étape, la découverte de l’artwork, laisse courir l’imagination, tant la simplicité est poussée à l’extrême. Une fois le cd mis en route, on comprend vite que l’écoute des huit titres de Featuring Animals ne sera pas dénuée d’effets. En guise d’entrée en matière prophétique, Trojan transmission combine des dissonances guitaristiques et un dialogue entre cris saisissants et voix FM, avec en toile de fond une rythmique purement rock’n’roll. Frénétiques, les trois lillois nous délivrent ici un cocktail de riffs assassins : Beigbeder parlait de nouvelles sous ecstasy, il trouve ici son équivalent musical. Le voyage continue avec Worms and Chevals ainsi que Pawns’ Assault, deux odes à la syncope rythmique et aux guitares pauvres en gain, mais riches en sonorités. Le rock noisy écorché vif du trio tient l’auditeur en haleine, oscillant entre atmosphère pesante et urgence sonore. Perfect stag’s bell, où quand le ternaire rencontre le binaire. La cadence saccadée laisse sa place à des riffs rageurs, toujours avec cette présence vocale en fil rouge. La toute fin du titre fait la part belle à une débauche d’accords riches en émotions et de voix torturées, avant de laisser la place à un interlude aux teintes prog. To kill boyhood, la pièce maîtresse de l’album, fait écho à cette pause avec une guitare funèbre et une basse fuzzée à l’extrême, avant de plonger l’auditeur dans une succession d’accords intenses. La batterie porte à elle seule un chant-mégaphone acide, suite à quoi le trio part dans un maelström de distorsions intenses. Une envolée lacrymale aux accents doux-amers d’une rare beauté, dAS MODEL franchit ici le point de non retour, et nous avec. Et Braga de prendre la suite, sans rupture ou presque. L’agitation du six-cordiste emporte le reste du groupe avec lui, avant de bifurquer vers un down tempo où l’on s’époumone, la rupture est proche. Le voyage se termine avec Saccharine Sabotage, où apparaissent xylophone et trompettes, pour le dernier mouvement d’une symphonie noisy du plus bel effet.

Pierre

Where My Soul Begins To Bend

Après un premier album réussi, les suisses de Carma Star reviennent à la charge avec Where my soul begins to bend, un nouvel opus où le trio offre un néo-métal chargé en émotions. Car plus qu’une originalité dans les compositions, c’est une ambiance qu’il faut chercher au travers des 11 titres que compte l’album. À cet effet, Amnesia débute l’album dans une atmosphère mélancolique, avant que les cris ne prennent place à la faveur de Twothree, dont les guitares rappellent Karma and effect de Seether. L’enchaînement des titres ne laisse aucune pause à l’auditeur, qui se laisse prendre dans ce tourbillon de nostalgie et de colère. Côté voix, il est impossible de ne pas rapprocher Emmi, chanteur/bassiste, du très torturé Aaron Lewis de Staind, surtout sur Earier. Toujours dans une veine planante, So Far Off donne la réponse à Reminder avant que l’on raccroche les wagons avec l'énergique Fail. La production de l’album est telle que l’on a peine à croire que seules trois personnes sont responsables de cette efficacité. Oubliées les fioritures, Carma Star va droit au but, même lors de Fall Out, sorte de ballade électrico-nostalgique, ou même pendant les quelques longueurs de Rewind. Friendly Fire résonne comme un dernière salve d’énergie, menant vers One Time Next Time, qui reproduit avec un certain degré de réalisme la fin d’un tourment, le tout dans un tempo lent à souhait et une voix des plus aérienne.
Même si rare sont les albums qui ne sont pas uniquement une juxtaposition de titres, Where my soul begins to bend en fait partie. En privilégiant l’efficacité, Carma Star développe une ambiance dont il est difficile de se défaire aux dernières notes de l’album.

Pierre

06 avril 2008

Aqme @ Omnibus

Quelle différence entre le concert d’Aqme vu il y quelques années pour la tournée Sombres Efforts et celui que j’ai vu à St Malo pour l’un des rares passages bretons de la tounée d’Hérésie ? Quelques éléments de réponse…

21h, Headcharger prend ses quartiers sur la scène malouine devant un public un peu dégarni (bien que jeune). C’est la dure loi des premières parties mais le combo Caennais en fait son affaire. Son chanteur démoniaque à la bougeotte aigüe se fait le porte voix d’un rock’n’roll hardcore dévastateur. Dans des conditions sonores proches de la perfection, Headcharger se donne sans compter. Une référence à Metallica plus tard, le set s’achève et on en redemanderait presque. Ceux qui ne les connaissaient pas ont pris une grosse claque, pour les autres ce n’est qu’une confirmation : Headcharger a un bel avenir devant lui.
Le temps du traditionnel changement de plateau et les arpèges d’Hérésie résonnent enfin dans la pénombre de la salle. Aqme sort des ténèbres, Étienne en tête. Lourd sacrifice débute dans une démente impression de puissance, le tout dans des conditions sonores optimales. Pas le temps de respirer, Un goût amer et Le rouge et le noir s’enchaînent, toujours dans une qualité d’interprétation rarement observée sur scène depuis des lustres. Que dire de plus alors quand Thomas se met dans la peau d’un comique entre chaque titre ? Pas grand chose. Bonne humeur et musique sombre font bon ménage, et Aqme sait mettre ses qualités en avant, entre distorsion furieuse et autodérision. L’alchimie entre les titres de jeunesse du combo et ceux de sa dernière livraison discographique est tout bonnement excellente, surtout quand Si n’existe pas donne la réponse à Uniformes, avant justement d’aborder l’inévitable La réponse et son final chaotique, cocktail de down tempo et de riffs lancinants sur fond de cris hargneux. Le charisme ne Thomas n’est plus à prouver, d’autant plus que sa voix ne faiblit pas, même sur le refrain de Superstar, pourtant placée en fin de show. Les backing vocals assurés par Charlotte et Ben le soulagent visiblement, une liberté qui lui permet d’assurer un set sans fausses notes, une performance quand on voit les tessitures vocales différentes selon les albums. Si la prestation d’Headcharger avait mis un peu plus tôt la barre assez haute en termes de jeu de scène, Aqme remet les pendules à l’heure et montre qui est le patron. Le quatuor est dans une forme olympique et le montre volontiers. Depuis Sombres Efforts, le groupe a pris de la bouteille (et du bide), et Étienne s’affirme plus particulièrement, assénant sans cesse sa batterie tout en n’étant pas avare de double pédale, apportant une autre dimension aux versions studio des titres. Depuis l’époque de la Team Nowhere, Aqme a atteint son apogée. Le choix des petites structures s’est finalement trouvé payant tant l’intégrité du groupe fait plaisir à voir. En définitive, Hérésie n’en est pas une, et le dernier album du quatuor parisien trouve tout son sens en live, le domaine de prédilection du groupe.

Setlist :
Hérésie, Lourd Sacrifice, Un goût amer, Le rouge et le noir, Pornographie, Karma & nicotine, Le poids des mots, Les enfers, À chaque seconde, Pas assez loin, Casser/Détruire, Uniformes, Si n’existe pas, La réponse // Ténèbres, Superstar, 312, Triskaidékaphobie.

Pierre

Merci à Manu de l’Omnibus pour l’accréditation.